Demain et Après

Dans un besoin de quête de sens, après un travail de reconnexion à la nature et la rencontre d’un infatigable colibri posé sur l’épaule d’un paysan philosophe, emportée par une grande spirale multicolore sur laquelle couraient encore un dragon et son cornac australien plein de verve, j’ai entendu conter Demain. Mais comment être dans le présent, ici et maintenant, alors qu’un coup de gong, une respiration, m’ont déjà projetée vers Après.

Ma tête bourdonne de conseils. Ma vision se noie de chemins enchevêtrés qui brouillent l’horizon. Ni le temps du tri, ni du choisi, ni du réfléchi. C’est un brouhaha, c’est le monde entier qui parle, et dit et redit de voix en voix à mes oreilles. Le son qui rebondit et mêle les messages, paysans d’ici sauvés par la distribution qui ailleurs dicte ses prix, déclarations qui enflamment la relocalisation de nos industries, grande vague d’emplois en vue ou typhon du chômage, le monde découpé en corporations, ici les matières premières, là le tourisme, là-bas, plus loin, l’industrie et partout la finance. Il y a peu ce plus loin était mieux, les tankers, les grands porte-containers, les avions qui tournent autour de la terre. En un clin d’œil, tu es là et demain tu seras ailleurs, la mode était au monde tout entier avalé plusieurs fois. « Let’s be global » était le message qui résonnait partout, avec ses étendards brillants, le monde selon Gap. Aujourd’hui, le message serait plutôt : « sorrow floats », cette tristesse latente qui imprègne l’air d’une fin de règne. Loin de s’en imprégner, ceux qui flattent encore cette ère essoufflée, avec la même vigueur clament aussi que le temps du changement radical est venu, ils avancent fiers, et masqués, le verbe haut qui dit relocalisation, circuits courts, tous paysans , plus d’écologie. Ils acclament sans vergogne ces héros en blanc qu’ils privaient de ressources avant-hier seulement. Les poches s’ouvrent, la dette ne compte plus, foin des règles communautaires, des indices, de l’inflation, le possible le redevient. La magie est au bout de leurs mots, les cours de bourse sont au niveau du sol et pourraient même se transformer en sillons stériles. Qui sortira vainqueur de cette guerre sans véritable ennemi ? La microscopique particule serait en train de nous mettre à mal, mais qui de la particule ou de l’humain est responsable ? Haro sur la particule, car de héros nous aurions besoin alors que notre monde bascule par manque de soin !

Demain ou Après, et après-demain, que restera t’il de ces émois, de la verve enflammée mais sans foi. Notre monde n’a besoin ni de hérauts bruyants, ni de héros clinquants, mais d’humains conscients, humbles et audacieux dans leur simplicité, avec pour seul guide l’intention en toute action, de mettre la vie au centre.

2/04/2020 – Isabelle Mallézé

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